Cinéma Roussel
L'univers singulier d'un écrivain rencontre parfois des échos inattendus dans des films qui lui sont a priori étrangers. C'est la thèse paradoxale de ce livre, inspiré par l'œuvre énigmatique de Raymond Roussel, admiré des surréalistes. Révélés de façon posthume, ses procédés d'écriture, basés sur la stricte permutation des lettres, favorisent curieusement un imaginaire visuel féerique et fabuleux.
Si ses livres ne connurent pas d'adaptations au cinéma, leur influence secrète et latente transparaît en revanche, à la manière d'un fil rouge, dans de nombreux films. Il suffit pour l'observer de prêter attention à l'affleurement de figures poétiques chez des cinéastes qui opèrent des courts-circuits entre les mots et les images sous les motifs de la permutation (Buñuel, Greenaway, Ruiz), du rébus (Frampton, Smith, Snow), du double (Chaudouët, Duras, Fitoussi, Rivette) ou de la métamorphose (Maddin, Ottinger, Quay, Švankmajer). D'où l'hypothèse d'un cinéma roussellien, à la croisée de l'expérimentation plastique et de l'invention narrative, caractérisé par une certaine dissipation figurative, quasi pyrotechnique. “Et je me réfugie, faute de mieux, dans l'espoir que j'aurai peut-être un peu d'épanouissement posthume à l'endroit de mes livres”, écrivit Roussel, ingénu, en guise de consolation. Cinéma Roussel se propose d'offrir à l'écrivain un peu d'épanouissement posthume à l'endroit de ses films virtuels.